dimanche 20 décembre 2009

Free à la table des grands

Free à la table des grands
Le trublion de l’internet va devenir le quatrième opérateur mobile et promet de diviser les factures par deux. Ses concurrents préparent déjà la riposte.
Xavier Niel a gagné un nouveau terrain de jeu. Après avoir révolutionné l’Internet en inventant la Box et le forfait "triple play" (Web, téléphone, télévision) à 29,90 euros, le fondateur et propriétaire de Free va bousculer l’univers du portable. Le trublion des télécoms a finalement été retenu vendredi par le régulateur du secteur (l’Arcep) comme le quatrième opérateur mobile français. Iliad, la maison mère de Free et d’Alice, était le seul candidat en lice. Le groupe recevra sa licence mi-janvier contre un chèque de 240 millions d’euros. Le lancement du service est prévu au plus tard début 2012.
De quoi réveiller un marché verrouillé par le trio Orange-SFR-Bouygues, condamné en 2005 pour entente à une amende record de 534 millions d’euros. L’objectif de cette quatrième licence est bien de faire baisser les tarifs. "Le prix moyen pour le consommateur français est l’un des plus élevés d’Europe", a rappelé le président de l’Arcep, Jean-Ludovic Silicani. Le président de l’UFC-Que choisir, Alain Bazot, s’est "réjoui" de l’arrivée de Free Mobile, qui lui fait "espérer rapidement la fin d’un cartel".
Vers une baisse des tarifs de 7%
La naissance d’un quatrième opérateur devrait profiter à l’ensemble des abonnés. Les tarifs du mobile devraient baisser en moyenne de 7% à moyen terme, selon Bercy. Stéphane Dubreuil, consultant au cabinet Sia Conseil et auteur d’une étude sur l’arrivée de Free Mobile, est plus réservé. "Le prix de la minute va chuter, mais la baisse de la facture sera limitée, car les concurrents de Free préféreront en donner plus pour le même prix", tempère-t-il. Xavier Niel a martelé qu’il voulait diviser par deux la facture d’un foyer, soit 1 000 euros d’économies par an. "Notre objectif est de proposer une offre à la hauteur des attentes, c’est-à-dire simple, transparente et bon marché", précise le directeur général du groupe, Maxime Lombardini.
Les engagements pris devant l’Arcep confirment ces principes. Free va lancer un forfait comprenant plus de trois heures d’appels pour moins de 20 euros par mois, soit 15 euros de moins que l’équivalent chez SFR. Les offres pour les clients qui ont déjà un portable seront sans engagement. Pour les autres, le prix du terminal sera clairement indiqué, avec possibilité de le payer en plusieurs fois sur la facture mensuelle.
Free compte jouer la carte de l’Internet mobile, en incluant ce service dans tous ses forfaits. "Ce sera du vrai illimité", confiait récemment Xavier Niel au JDD. Ce qui signifie qu’il devrait offrir des usages aujourd’hui interdits ou facturés en plus par les opérateurs (téléphonie via Internet, utilisation du portable comme modem, etc.). Enfin, il devrait installer des mini-antennes dans ses Freebox pour optimiser la couverture dans les foyers.
Cela suffira-t-il pour s’imposer sur un marché déjà saturé, où 96% des Français possèdent déjà un portable? Selon l’Arcep, Free veut conquérir de 10 à 15% des clients d’ici à 2020. Même si l’opérateur peut espérer s’appuyer sur 4,3 millions d’abonnés à Internet, l’objectif est jugé ambitieux par certains analystes. Sia Conseil mise sur une part de marché de 6 à 12% seulement.Les trois opérateurs en place ne comptent pas se laisser faire. Après l’échec de leur intense lobbying anti-Free, ils ont engagé plusieurs recours en justice pour tenter d’annuler l’attribution de la licence. Et la contre-offensive sur les tarifs a déjà commencé. Bouygues Telecom, qui reconnaît être "le plus challengé", a créé avec succès Ideo, le premier forfait combiné fixe-mobile. Orange s’appuie sur Virgin Mobile, l’opérateur virtuel qu’il héberge sur son réseau. Grâce à une ristourne que vient de lui consentir son hôte, Virgin propose une offre à 29,90 euros par mois incluant cinq heures de voix, les SMS et l’Internet mobile illimité.
Free forcé de louer le réseau des concurrents
Face à ses concurrents beaucoup plus riches que lui, le défi de Free est titanesque. La construction de son réseau va lui coûter 1 milliard d’euros. Vu la polémique sur la nocivité des ondes, il aura du mal à installer rapidement ses antennes sur les toits (lire encadré). Or le fournisseur d’accès à Internet doit absolument couvrir un peu plus de 25% de la population d’ici à deux ans. Une fois ce seuil franchi, les trois opérateurs seront obligés d’héberger le nouveau venu.
Ce sera le talon d’Achille de Free. Il sera au départ dépendant des tarifs négociés… avec ses concurrents. De plus, la loi n’oblige pas les trois grands à louer leur réseau à haut débit (la 3G). "Du coup, les meilleurs clients qui consomment beaucoup d’Internet mobile, comme les propriétaires d’iPhone, n’iront pas chez Free", pronostique Stéphane Dubreuil. "Les opérateurs auront intérêt à faire affaire avec nous pour récupérer une partie de ce qu’ils perdront du fait de notre arrivée", rétorque Maxime Lombardini.
Free récupérera-t-il un jour son investissement? Le groupe prévoit d’atteindre l’équilibre financier vers 2015. "C’est aussi une stratégie défensive. Puisque les trois autres opérateurs font à la fois du fixe et du mobile, il n’avait pas vraiment le choix", analyse Stéphane Lelux, président du cabinet Tactis. Free Mobile ne sera probablement pas une poule aux œufs d’or. Mais Xavier Niel se battra à armes égales.Lejdd.fr du 19 Dec 2009

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